11 juin 2020

Lettre à un oiseau

jeudi 11 juin, 2020

Depuis le confinement

Cher oiseau,

Pardonne-moi si j’interromps ton vol ! J’ai besoin de parler à quelqu’un. Même, y’a urgence de le faire ! Mais, j’ai comme l’impression que le monde est ailleurs en ce moment. Il a de la Covid sur la planche, je crois. On a à faire… 

Dès le début de cette pandémie, curieux comme moi, j’ai tenté de comprendre ce qui se tramait. Bien sûr, de bon réflexe, j’ai foncé vers les médias. Mais ceux-là n’avaient pas bien aidé. Ils se contentaient de têtes  spécialisées, « qui tournent encore en rond dans la spirale du virus », et offraient plus d’occasions aux politiques véreux, « qui continuent de nous duper ». J’ai appris que dalle, au bout du compte.   

Hélas petit oiseau ! Les adultes de ce monde sont trop durs d’oreilles. Il sont tellement nuls, tu sais ! Quand ils ont une chose en tête, impossible de les faire changer d’idée. Même si cette chose nous empêche de respirer, ils insistent jusqu’à ce qu’on ne bouge plus. 

Le truc encore avec ces adultes, c’est qu’ils sont prétentieux. Pas faciles à raisonner. On peut passer notre temps à leur répéter la même chose, ils n’écoutent jamais. Les enfants sont tellement mieux qu’eux. Ils sont moins têtus. Ils écoutent, eux, et ne mentent pas. C’est le plus important. Mieux encore, ils sont simples et purs. Sauf qu’en ce moment de confinement, ils sont un peu nerveux. Et quand ils sont comme ça, ils sont aussi nuls que les adultes. Je te parle, petit oiseau, car je sais, libre comme tu voles dans le vaste ciel, tu es comme eux, les enfants.

Jusqu’à ce que je parle à Dorvensca j’ignorais ta présence. Elle, c’est une amie. Elle vit à Petit-Goâve. C’est là que je suis né. J’y étais encore y’a un peu plus de deux ans. Sans doute je t’aurais reconnu vers ce ciel bleu entrecoupé de nuages. Ici aussi, quand je lève la tête, j’aperçois pleins de ceux de ta belle et heureuse famille. 

Les oiseaux ne se confinent pas. Pourquoi ?
(Confinement)
Crédit photo : Maïlis Donnet

Cet après-midi là, elle m’a référé à vous de la plus douce des manières : « Je viens de terminer la saison 5 d’une série. Là, je regarde le ciel. Il y a pleins d’oiseaux qui ne respectent pas le confinement sous les nuages. Je les envie. » Voilà, c’est-ce qu’elle m’a répondu, quand je lui demandé ce qu’elle faisait par cet après-midi bien ensoleillé. 

C’est ainsi que j’ai eu l’idée de t’écrire mon cher ami oiseau, si plein de liberté. Si fier d’être un simple oiseau par dessous les nuages. Pas besoin de se confiner. Pas besoin de porter un masque pour voler. Pas besoin de se méfier du lendemain…

Quel est donc ton secret ? Quel est donc le secret de ton espèce pour être toujours aussi libre ? Quel donc ce qui explique, chez-vous, une telle quiétude d’esprit du virus ? Vous ne respectez même pas ce qu’ordonne nos gouvernements, pourtant vous respirez mieux que jamais. Je suis curieux de vivre comme chez-vous ! 

Dis-moi petit oiseau, n’a-t-on pas, chez-toi, des classes, ou même des castes sociales ? Tu sais, ce bon vieux sujet qui passionnait tellement Karl Marx. Les élites, les politiques, le prolétariat, le système capitalisme, son usage et ses conséquences, le monde qui en découle aujourd’hui, où tous nos droits, les plus fondamentaux, se retrouvent coincés  entre l’égo et les ambitions de l’humanité. Où tout est perçu d’un oeil économique et politique. Où tous les rapports humains deviennent un énorme jeu de calcul. Je trouve vraiment ringard, ces nouvelles tendances du monde ! Pas toi !?

Je ne veux pas être long petit oiseau. Mais te parler m’a était bien utile. Tu vois, comme je te l’ai dit au tout début de ma lettre, ici, on est bien trop occupés à tenter de freiner la course de ce maudit virus. Approche ! Je vais devoir te parler tout bas maintenant ! « Je crois que la terre rançonne les humains de quelque chose ! » Sauf que, je ne vois encore exactement ce que c’est. Toi, si tu le sais, tu me le diras, n’est-ce pas !?

Réponds-moi vite petit oiseau, il me faut ton aide pour aider les miens à comprendre les choses. Les adultes surtout, ils ont la tête dure !

Une dernière chose, je ne suis pas un enfant même si je te parle comme un. Ça, tu me le pardonneras aussi. Comme les adultes mentaient tout le temps alors, je me suis dit que tu ferais plus facilement confiance à un enfant. Tu comprends !? Je l’espère en tout cas ! Bon, faut que je file maintenant.

Je t’embrasse bien fort petit oiseau ! À très bientôt !   

Carlile Max Dominique Cérilia 

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